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Les voiles du partage Ciotat-Africa
11 novembre 2011

CASAMANCE - Ziguinchor

Vendredi 11/11/11

Depuis hier, j'ai débarqué à Ziguinchor. Les bateaux partis passer 2 jours dans un bolong.
Initialement, il était prévu d'aller y passer la journée en pirogue avec balade dans la mangrove et bouffe préparée par la femme du piroguier dans son hameau. Tard la veille au soir, d'autres ont proposé d'y aller avec les bateaux et de passer la nuit sur place. A mon avis, il valait mieux rester sur le projet initial : plus de possibilités de découverte, circulation dans la mangrove alors que c'est impossible avec nos bateaux (pas assez de profondeur) ; et puis annuler tard dans la soirée pour le lendemain matin tôt, j'ai dit qu'ils n'auraient pas fait ça en France.
On a été deux à exprimer cet avis. Le deuxième est quand même parti, moi j'ai refusé.

Et j'ai bien fait ! Du coup, je suis allé avec le dernier bateau resté ici Soualé, visiter un village avec des gens supers.

Fernand, un français qui vit ici depuis 5 ans et qui s'occupe d'une toute petite ONG en France (30 adhérents) a monté des opérations très intéressantes. Il a su donner le petit coup de pouce au bon endroit pour que les choses avancent.

Partis en taxi, une R18 break d'au moins 800 000 kms au compteur qui ne marche plus, tout le reste à l'avenant ; que le chauffeur loue à la journée à un "patron" pour 10000 F CFA au moins (20€), il paye lui-même son essence presque aussi chère qu'en France, les PV quotidiens (ici flic c'est une rente), les crevaisons, etc….

 

En allant vers Djilakoun, la route traverse la mangrove qui déborde parfois sur la chaussée, sur 15 kms, puis piste en latérite rouge, l'image classique des pistes africaines. Arrêt devant un beau marigot à l'eau très claire (pour une fois), on cherche à voir les crocodiles, il y en a 5, dont un gros caïman ; mais ils ont filé à notre approche. Finalement, je n'ai vu que les roseausx bouger à quelques mètres devant moi.

 

Ensuite, petit chemin embroussaillé dans la forêt, entre les grandes herbes. Où va-t-on ? Il fallait le connaître le chemin !

Une petite clairière dans la forêt, une case ronde construite autour d'un énorme palmier (?) quelques cases en banco (terre + eau = boue tassée et ça fait de belles maisons plutôt fraîches). Ces cases dont la construction a été décidée par le village, servent à l'accueil de groupes.

Visite des cases, très simples, très propres, des petites chambres ou des dortoirs avec couvre-lits et rideaux en batik, plafonds en bois avec isolation par du sable. La case cuisine, la case douches, toilettes avec fosse septique !

Depuis pas mal d'années, entre autres, ils reçoivent régulièrement en même temps des groupes d'ados d'un collège de petit village français et leurs correspondants du collège d'à côté qui passent plusieurs semaines ici à faire des chantiers d'intérêt général le matin, des activités l'après-midi et des soirées…

Bruno a interviewé les personnalités locales (le chef du village, le responsable du chantier, le délégué du quartier, la déléguée des femmes du village et Fernand, puis un des habitants du village a voulu parler lui aussi pour dire qu'ils sont fiers de ce qu'ils ont réussi à faire à Djilakoun, de travailler tous ensemble pour monter ces cases d'accueil, d'avoir pu rembourser le prêt qu'avait accordé l'association de Fernand…

Actuellement, ils ont redemandé un prêt (environ 3000€) qui leur a permis de faire construire une nouvelle pirogue pour les pêcheurs du village et ils sont en train de rembourser. Démonstration de l'utilisation des outils pour cultiver le riz, avec un manche en ébène (marron) s'il vous plaît. Plutôt efficace, l'outil, on aurait ce genre de pioche en France on se casserait moins le dos !

En fin de visite, un français en vacances ici, sort son ordi pour nous montrer la construction des cases. Toutes les femmes et les enfants du quartier s'agglutinent derrière l'écran et font des commentaires en se voyant en vidéo. Il paraît que c'est le truc qu'ils aiment le plus quand les blancs sont là. Faut dire qu'ici on n'a pas vu l'ombre d'une antenne TV. De toute façon, il n'y a pas l'électricité au village.

Ensuite on continue vers le collège de Coubalan, où Alain (le skipper de Soualé, un personnage !), prof à la retraite qui a vécu 25 ans en Afrique, pince sans rire qui ne se prive pas de faire de l'humour sur son handicap, un super marin malgré son air rêveur) est déjà venu faire un projet vidéo avec les élèves.

Une piste chaotique à partir de la piste principale, 700 élèves au collège qui ressemble plus à un chantier de construction : des perpaings partout, des fers à béton, des poteaux en ciment posés au sol. Accueil par Daouda, le directeur.
Et une quarantaine de femmes qui sont là, dans leurs superbes boubous.

La politique éducative au Sénégal :
Il fallait un "collège de proximité" dans ce coin pour accueillir les élèves des 5 ou 6 villages à la ronde.

- Le ministère nomme des profs (ils viennent de tous les coins du pays et ils arrivent quand ils peuvent. Les vacances sont finies depuis un mois et tous les profs ne sont pas encore là).

- La municipalité trouve un terrain.

- Et les parents se débrouillent pour construire le collège ! aidés par les enfants.

- Le ramassage scolaire, c'est à pieds (50 min le matin, autant à 12h, même chose à 15h en plein cagnard et retour après 19h dans le noir car il fait nuit !)

C'est là que Fernand intervient encore : -
- il a trouvé du financement pour payer les tôles de toiture (sans toit étanche le banco ne résiste pas longtemps aux pluies). Ils en sont à 1é ou 15 classes, la bibliothèque et la salle d'informatique sont en construction, elle seront finies d'ici un mois ou deux.
- Pour éviter les allers-retours à midi, les parents d'élèves ont décidé de créer une cantine, et ce sont les femmes du village le plus proche qui viennent tous les jours (une vingtaine à chaque fois) bénévolement faire la cuisine, en plein air bien sûr, pour les 700 élèves. Fernand a fourni de quoi acheter les ustensiles de cuisine. Elles sont très fières de nous dire qu'elles ont voulu éviter aux femmes des autres villages de se déplacer et par solidarité entre femmes elles assurent ce travail. Chaque village fourni une charrette de bois pour la cuisson. Après la salle d'informatique, ils vont construire une case pour la cuisine.
- Pour "alimenter" au moins en partie la cantine, un prof et les élèves ont créé un jardin potager : semences, goutte à goutte, clôture. Pour la clôture, super Fernand a encore frappé, il a fait fabriquer un moule par un ferronnier, les enfants coulent des poteaux en béton qui servent ensuite pour la clôture et aussi à faire des linteaux de fenêtres. C'est eux qui ont creusé la tranchée pour le tuyau d'eau depuis le château d'eau jusqu'au jardin. Des élèves d'un lycée agricole du Gard sont venus en stage pour expliquer comment faire et utiliser du compost.

Mame, une ancienne élève du collège, en terminale dans un lycée un peu plus loin est venue avec nous. Elle est allée dire au principal qu'elle n'était pas contente car "sa salle", celle qu'elle avait construite avec ses copines et ses parents était sale et mal entretenue… Message reçu.

Le principal nous a dit que "les gens qui viennent pour donner puis repartent ne l'intéressait pas, "ça créé de la dépendance et il y en a déjà trop ici".
Ce qu'il souhaite c'est "un partenaire qui s'engage avec les locaux pour faire un projet dont on a besoin en fonction de ce qu'on organise nous-mêmes.. Avec ce qui se passe ici dans ce collège, les jeunes ont compris qu'ils doivent prendre des initiatives et développer la solidarité entre eux. On commence à en voir les résultats parmi les plus anciens élèves qui entrent maintenant dans le monde du travail".

Ça me réconcilie un peu avec les ONG. Ici en ville on voit pas mal de 4X4, d'enseignes, de bureaux avec pignon sur rue de grosses ONG professionnelles. Beaucoup de fric injecté, mais à la fin que reste-t-il vraiment ? à qui ça profite ?

Dans Ziguinchor, on croise pas mal de blancs, je devrai dire plutôt de blanches car ce sont en majorité des femmes souvent accompagnées d'un homme du coin, qui sont en "mission" : Pourquoi ? Pour qui ? pas toujours très clair de comprendre et ce n'est pas en quelques jours que je vais y arriver.

Une belle journée, retour de nuit, je ne parlerai pas de l'éclairage du taxi, ni de l'autoradio qui sortait de son logement à chaque cahot, et il y en a beaucoup ! Bien sûr au barrage de gendarmerie (deux à l'aller, un au retour), le chauffeur s'est pris un PV. Un espèce de péage personnel perçu par le flic…

Nuit à l'hôtel "Le perroquet", c'est la première fois que je dors dans un lit qui ne bouge pas depuis 1 mois ½….

Alain est reparti quelque part dans la campagne avec Fernand pour livrer des ruches mises au point pour ici. Elles vont être copiées par un menuisier, puis mises en place dans un village. Plus quelques panneaux solaires pour ce même village.

La suite à plus tard….

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